Tournant histo­rique : L'Union euro­péenne veut se retirer d'un traité sur l'énergie dévastateur pour le climat


15 février 2023

La fin du Traité de la Charte de l’énergie, un traité controversé et obsolète, est proche. Après des pressions des ONG et des politiciens, notamment du Parti pour les Animaux néerlandais, la Commission européenne a reconnu la semaine dernière que le retrait de ce traité international sur l'énergie « semblait inévitable ». Le traité protège les entreprises énergétiques et permet aux grands pollueurs de soumettre des réclamations d'un milliard de dollars aux gouvernements qui veulent prendre des mesures climatiques. « Lorsque l’on prend la crise climatique au sérieux, il n'y a qu'une seule option et c'est de s’en retirer », a déclaré le député Lammert van Raan du Parti pour les Animaux. « Donc, une grande victoire pour le climat. »

La députée européenne Anja Hazekamp du Parti pour les Animaux a plaidé devant le Parlement européen pour l'annulation du traité sur les énergies fossiles.

Le traité controversé (Traité de la Charte de l’énergie ou TCE) date des années 1990 et a été signé par plus de cinquante pays dans le monde, dont les États membres de l'Union européenne. Il a été élaboré pour protéger les investissements des multinationales de l'énergie contre les conséquences de changements de cap soudains dans un pays. Mais ces dernières années, il s'est avéré être un obstacle croissant à la lutte contre la crise climatique. Les grands pollueurs peuvent réclamer des milliards d’euros en vertu du traité aux États membres qui mettent en œuvre des politiques préjudiciables à l'entreprise. Résultat : les gouvernements écoutent trop les intérêts de ces genres d'entreprises au lieu de l'Accord de Paris sur le climat.

Des scientifiques, des ONG telles que ClientEarth et les Amis de la Terre et un nombre croissant de politiciens avertissent que le traité donne une quantité inacceptable de pouvoir à l'industrie des combustibles fossiles et entrave la transition des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables - la transition qui est urgente et plus que nécessaire pour lutter contre le changement climatique - et faire face aux crises énergétiques. Ainsi, le gouvernement des Pays-Bas a déjà été poursuivi deux fois pour ses projets d'élimination du charbon, et une société pétrolière et gazière britannique a déposé avec succès une réclamation de plusieurs millions de dollars auprès de l'Italie - une réclamation qui représente près de neuf fois le montant que la société avait investi, puisqu'il doit aussi compenser les « pertes de profit à l’avenir ».

Non au TCE – Oui à l’action pour le climat !

Manifestation à Bruxelles des Amis de la Terre Europe en 2021.

Aussi le Parti pour les Animaux néerlandais fait campagne depuis des années pour se retirer du traité. Le parti a déjà posé des questions parlementaires en 2019 et l'année dernière, il a appelé le gouvernement néerlandais à s’opposer au traité et à plaider auprès de la Commission européenne pour un retrait conjoint de tous les États membres de l'UE. Et avec succès : la proposition a reçu le soutien de la majorité de l’Assemblée nationale néerlandaise et peu de temps après, le ministre néerlandais du Climat et de l'Énergie a annoncé que les Pays-Bas se retireront du TCE, « de préférence avec le reste de l'UE ».

Depuis un certain temps déjà le Parti pour les Animaux a plaidé également au Parlement européen pour le retrait du traité par l'ensemble de l'UE, avec de plus en plus d'autres partis. Au printemps dernier, le ministre espagnol de l'Environnement et de l'Énergie a appelé à une sortie européenne, et en automne la France, l'Allemagne et la Pologne ont également suivi l'exemple espagnol. Après l'échec des tentatives de réforme du traité obsolète, une majorité du Parlement européen a voté en novembre dernier pour se retirer du traité TCE.

Le fait que la Commission européenne admette maintenant aussi qu'il devient intenable de continuer à faire partie du traité est un tourment historique. Pas trop tôt, selon la présidente du groupe parlementaire du Parti pour les Animaux Esther Ouwehand. Tel qu’elle l'a dit au gouvernement néerlandais en 2019 lors d'un débat à la veille du sommet européen (où tous les chefs de gouvernement européens se sont réunis) : « En ce moment, les chefs de gouvernement européens sont obéissants et veulent se rendre utile aux grandes entreprises. Ils se laissent faire chanter par une poignée d'entreprises d'énergie fossile, les dinosaures du business. Il ne peut y avoir qu'une seule réponse : éloignons-nous de ce traité !

Crédits photo de la manifestation contre le TCE à Bruxelles : Friends of the Earth / Flickr.